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Archive for mars 2012

Une phrase d’Henri Calet, en tout début, retient notre attention « Ne me secouez pas, je suis plein de larmes.» Gilles Archambault introduit ce récit autobiographique endeuillé de la mort de sa femme, Lise, le 26 décembre, 2010, sa conjointe depuis cinquante-deux ans. 

«J’ai perdu le seul être au monde avec qui je pouvais converser même dans le silence.  Voilà pourquoi je sens le besoin de ne pas me taire. Un hommage à la disparue? Elle n’y aurait pas cru. Nous avons longtemps pensé que nous étions réalistes, nous ne l’étions pas.  Nous vivions dans un rêve qui vient de prendre fin. Nous avions des clichés, nos redites, mais nous savions être émus la plupart du temps. Rendre compte de ces moments? En serais-je capable? Les mots ne peuvent que suggérer les moments d’intense bonheur.  Surtout que j’ai opté pour la pudeur.»

Un texte très intimiste, parsemé de souvenirs, empreint d’une grande et profonde tristesse, de cette sensibilité qui démarque l’auteur ; leur première rencontre, leurs voyages, leurs Paris, leurs enfants, leurs joies, leurs absences, leurs silences, un baume sur les j’aurais dû. « Je suis un survivant que l’on retrouve dans un monde qui ne lui convient plus.»

 

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Livre  courtepointe qui  présente 90 articles, certains très courts, d’autres quelques pages, certains très légers, amusants, d’autres très profonds, très intenses. Comme toile de fond cette biographie  échevelée.

Il était une fois un jeune garçon qui s’appelait Johnny. À Chicago en 1914, il avait dix ans.  Son père et sa mère étaient des immigrés hongrois.  Ils étaient passés par Ellis Island avant de rejoindre de la famille à Windber, Pennsylvanie. In God We Trust.  Johnny Weissmuller  fut le premier à réaliser le cent mètres nage libre en moins d’une minute.  C’était le 9 juillet 1922.  Il remporta cinquante-deux titres de champion des États-Unis et établis vingt-huit records du monde. Une des particularités de Johnny Weissmuller est de nager le crawl avec la tête hors de l’eau, méthode abandonnée depuis.

 « J’ai combattu des crocodiles au cœur de L’Afrique.  J’ai mangé des racines et dansé avec les lions.  Je suis né dans la jungle profonde au milieu des reptiles.  J’ai mangé des insectes.  Des millions de femmes se sont endormies le soir avec dans la tête des images grandioses où je nageais avec force, mon couteau encore entre les dents, le corps buriné par le soleil, bravant les piranhas, vers la femme de ma vie.  Un boa constrictor violait son corps fragile et tentait de la noyer en se laissant couler au fond de la rivière.  Je tranchai la tête du serpent, et nous fîmes l’amour toute la nuit.»

Je m’appelle Johnny, et Tarzan l’homme singe, c’est moi !

Mais ce recueil ne s’arrête pas à Johnny, l’auteur nous entraîne dans un caléidoscope d’articles bigarrés, hétéroclites couvrant une multitude de sujet tel JFK, la statue de liberté, Samuel de Champlain, Einstein, Sgt. Pepper, Al Capone, le lac Michigan, Hollywood, l’Amérique avec un grand A, et évidemment j’en passe. Un premier d’une trilogie portant sur l’an 1984, un «objet littéraire» rébarbatif en début de lecture, mais on devient rapidement accro, une écriture dynamique, moderne, humoristique, jeune. Une belle surprise.

 

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Notre narratrice, c’est MOI, une femme qui nous découvre son univers : Ressembler à un humain standard allait me demander de nombreuses années, beaucoup d’efforts et de discipline. De fait aujourd’hui, à 41 ans, je n’y suis pas encore parvenue. Le monde d’humains standard : une bulle où n’est réellement vu et entendu que ce qui est humain, où rien n’importe hors de l’humain, où tout le reste est paysage, marchandise ou nourriture.

Tante Isabelle hérite de sa sœur une entreprise de thon appelée Atunes Consuelo, située à Mazatlán, Mexique. Consuelo : Consolation, le nom le plus inadapté pour la pêche industrielle de la planète. Elle a hérité également de sa nièce, Karen. Isabelle s’est donnée pour mission de transformer cette chose en être humain. Une fillette qui ne parle pas, se contente de grogner, refuse les couverts, mange avec les doigts, même du sable mouillé. Une autiste irrécupérable, avec quelques pointes de génie. C’est  MOI.

«Voilà comment je suis née, Moi, un 21 août 1978, face à la mer, en criant Moi à pleins poumons, complètement formée et tondue, tout à sa place, y compris les socquettes et les sandales.» Son premier travail à la conserverie a été d’essayer tous les uniformes. « Moi, ce que je veux, c’est voir si les uniformes de l’usine me vont. L’uniforme de camionneur, du docker, d’ouvrière de marin, mais un attitre particulièrement  son attention, une découverte qui influença son parcours. Celui de plongée. Une combinaison en néoprène bleu : Et moi, toute entière étendue au fond du sable de l’océan, je me mets à exister. À être. » Un certain Monsieur Gould, milliardaire, vient rencontrer Tante Isabelle et  celle que l’on surnomme désormais Mademoiselle Capacités différentes pour lui présenter un plan de redressement pour sa conserverie moribonde. Et l’univers de la pêche industrielle du  thon s’en trouvera transformé…

Sabina Berman, Mexicaine juive, poétesse, dramaturge et réalisatrice, nous offre ici un très séduisant roman. Parfois moraliste, philosophique, écologique, humoristique, étrange, atypique, génial, attachant, original comme on les aime, on le quitte avec un manifeste regret.

 

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Treize univers de solitude, treize univers  «pokés», présentés dès les premières pages, par un rythme saccadé, effréné. De chapitre en chapitre, l’auteur nous découvre ses acteurs. En voici quelques-uns.

Fiona, vingt-sept ans, militaire, mariée à un militaire, en mal de son pays hivernal, prise dans une échauffourée avec des talibans Afghanistan.

Finch Clayton, conducteur de poids lourds, ancien gardien de prison dans l’aile des condamnés à mort. Toute la ville savait qu’il avait craqué après avoir vu un exécuté se réveiller à la troisième injection.  Sa devise : Live free or die.

Véronique, artiste-peintre, lors d’une répétitive réunion familiale, cette réplique à son frère qui raconte tout : Tsé Paul, mon chou, je préfère être une artiste sur l’aide sociale qu’un fonctionnaire fif qui se fait enculer dans les saunas du village gai chaque vendredi.

Océanne, jeune adolescente, préfère punir sa mère. C’est elle qui a mis son père à la porte, c’est elle qui a brisé la famille.  Tant pis pour elle… Son père l’avait confirmé six semaines après s’être fait jeter dehors. T’sais puce, moi je voulais rester, je voulais vraiment pas que çà finisse de même…

Martin, baker de nuit chez Tim Hortons,  lors de la mort de son grand-père qui l’avait utilisé sexuellement pendant toutes ces années. Ce dernier lui lègue une petite fortune. Pour Martin sa Subaru Impreza, son cadeau d’héritage. C’était un monument mobile à la gloire de son silence, le bonbon mérité après une dizaine de week-ends au chalet, de pénis dans la bouche de grand-papa.

On retrouve nos treize acteurs,  dans un blizzard hivernal à bord de leur véhicule respectif, se dirigeant un à un dans ce carambolage monstre qui transformera plusieurs perspectives.

On accroche  évidemment avec ce style très particulier découvert dans La canicule des pauvres, très introspectif, très intime,  très sexuel, souligné par des anglicismes qui étoffent le texte. Un roman dit choral, polyphonique, mi-nouvelle mi-roman. Mais, un deuxième qui donne l’impression de déjà-vu par sa présentation de personnages, cet environnement très érotique, cette atmosphère obsessionnelle.

 

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